La Pierre des Morts

La Pierre des Morts:

A la jonction entre la rue de Baurepaire et la celle dite du Champ du Fourg, on peut voir une large pierre plate reposant sur deux pierres levées à usage de banc. Selon une tradition qu’aucun écrit ne vient confirmer, cette pierre aurait été utilisée pour déposer les morts du hameau éloigné de Fontainebrux, avant leur prise en charge par le desservant de la paroisse.

En réalité, cette pratique semble fréquente un peu partout en France, jusqu’à la fin du XIX ème siècle, et l’usage des pierres des morts, ailleurs nommées pierres d’attente, ou encore reposoirs, se trouve souvent documentée, en particulier en Auvergne, dans le Forez et l’Allier mais aussi dans les régions de l’Ouest, comme dans les Alpes françaises ou suisses.

Emile Guillaumin (la Vie d’un Simple) nous conte qu’à l’occasion du décès de sa grand-mère, dans un hameau du Bourbonnais, on déposa le cercueil à l’entrée du bourg sur deux chaises en attendant l’arrivée du curé, qui vint accueillir la défunte pour l’accompagner jusqu’à l’église.

En Auvergne, les familles habitant dans les jasseries devaient souvent descendre leurs morts sur le dos jusqu'au village le plus proche afin que ceux-ci soient enterrés chrétiennement. Les prêtres n'étant pas toujours présents, il était prévu de grandes pierres carrées, sortes d'autels, sur lesquelles les porteurs déposaient le mort.

A Valmorel, en Savoie, c'est là que les cercueils des défunts éloignés du chef-lieu étaient déposés. Le prêtre venait accueillir le corps et réciter des prières.

Citons encore Charles-Ferdinand Ramuz,: "Là, au bord du chemin, il y a la pierre des morts. C'est une grande dalle posée à plat qui a justement la longueur d'un homme et que la nature semble avoir mise à cette place tout exprès. Le cercueil est lourd..., et il faut bien qu'on le ramène à sa paroisse. Les porteurs n'en peuvent plus. Alors la coutume veut qu'à cette place ils se reposent, se déchargent de leur fardeau."

La plupart de ces témoignages d'un culte des morts aujourd'hui disparu ont été détruits. Ils ont souvent été utilisés en remploi, pour servir de remblai pour des routes par exemple. La pierre des morts de Villevieux aura été heureusement bien conservée.

Pour ceux que le sujet intéressera :

Marcel Baudouin, « Les pierres d'attente des morts en France et en particulier les pierres des morts de l'Ile-d'Yeu (V.) », Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris

  • J. Gélis & J.-J. Immel. « De la maison mortuaire au cimetière : « cercueil du pauvre », « pierre d’attente » et « porte des morts » », Bulletin de la Société historique de l’Essonne 2020

  • J. Prudhomme « Pierres des morts et pierres de criée », Mémoires de la Société des Sciences et Lettres de Loir-et-Cher 2003